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PRIX DE L’ARGANIER : DES ECHANGES “MARQUANTS” ENTRE NOS ELEVES ET QUATRE ECRIVAINS FRANCAIS

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 Prix de l’Arganier 2021 : retour sur les rencontres avec Line Papin, Olivier Dorchamps, Philippe Vilain et Stéphanie Hochet

 

Dans le cadre du Prix littéraire francophone de l’Arganier, quatre classes de 2nde ont eu la chance de pouvoir approcher et débattre avec quatre écrivains prometteurs en lice sur cette 3e édition, lors d’une série de visioconférences organisée à la fin du mois de janvier dernier, au CDI et à la salle de la cantine, en partenariat avec l’Institut français du Maroc, la Petite Librairie d’Emma et le lycée français Descartes de Rabat.

Les élèves de la classe de 2.4 ont ainsi rencontré Olivier Dorchamps, auteur de Ceux que je suis, son premier roman qui raconte l’histoire de Marwan, né en France de parents immigrés marocains et dont le père décède. Il découvre que son père souhaite se faire enterrer à Casablanca et n’en comprend pas du tout les raisons. Le récit raconte ce voyage, le séjour, le deuil et les secrets de famille. Au cours de cette rencontre à distance, les élèves ont pu aborder avec lui toutes les facettes de ce roman tendre et léger traitant de la transmission, de la filiation et la question des identités multiples.

De leurs côtés, les élèves de 2.1 ont passé près de deux heures avec Philippe Vilain, essayiste, penseur de la littérature contemporaine et auteur de Un matin d’hiver. Très amène, ce dernier a dessiné avec eux les contours de cette histoire vraie qui lui a été rapportée par une femme. Celle-ci a subi la disparition de son mari sans jamais découvrir ce qu’il était devenu : l’avait-il quittée ? est-il mort ? Elle n’en sait rien. Son roman raconte l’itinéraire amoureux de cette femme, de la rencontre effusive à l’absence. Un ouvrage intime qui questionne aussi le rôle de la littérature et de l’auteur. Duras expliquait que la littérature commence là où le monde ne peut plus faire sens, qu’elle rétablit l’histoire, le sens, la cohérence. Ici, Philippe Vilain a pris un autre parti : il n’a rétabli aucun sens, aucune cohérence, il s’est contenté de livrer cette histoire.

Avec Stéphanie Hochet, les élèves de 2.7 ont pu aprécier l’importance chez l’auteur de Pacifique du rôle de l’écriture et ses processus, sur la création. L’écriture est évoquée dans son livre à la fois comme un acte de volonté fort et un appel. On est loin de l’image du poète sacré écrivant sous la dictée des muses.

Pacifique raconte en effet l’histoire d’un jeune kamikaze éduqué dans la tradition japonaise. A l’approche de sa mission, il doute et, en vol vers sa cible, il connaît une avarie. Il est obligé de se poser sur une île particulièrement isolée du monde où la 2nde guerre mondiale retentit à peine. Il fait la découverte d’un hors monde, d’un non-lieu. Utopie ? L’univers revêt alors une extrême sensualité.

Enfin, Line Papin, auteure de Les os des filles, s’est livrée sans fard aux élèves de 2.2. Et ce, avec beaucoup de sincérité et de pudeur, à la manière d’un huis-clos mené par la confidence, malgré les contraintes connues de la visioconférence. Les os des filles est une autobiographie qui s’ouvre sur le rituel d’enterrement vietnamien qui consiste à recueillir les os au bout d’un certain temps pour ne conserver qu’eux. Le récit est conduit à travers le fil rouge des femmes : la grand-mère, la mère, les tantes, la nourrice. Line Papin raconte son départ du Vietnam, arrachement à la terre natale et le long épisode d’anorexie qui l’a frappée ne lui laissant que la peau sur les os, motif essentiel du roman.

A chaque fois, les élèves avaient préparé leurs questions en amont, assistés des enseignants de français et des documentalistes. Pour beaucoup d’entre eux, c’était la première fois qu’ils rencontraient un auteur. Gageons que cette expérience leur donnera encore plus envie de se plonger dans la littérature, un art tellement utile pour la compréhension du monde et l’épanouissement personnel.

Cher Monsieur,

Nous venons une nouvelle fois vous remercier chaleureusement. Malgré ses modalités numériques, cette rencontre a été une réussite : la qualité d’écoute des élèves et leurs retours ensuite en sont des gages forts.

Pour bon nombre d’entre eux, c’est la première fois qu’ils échangeaient avec un auteur. Ils ont été très sensibles à la confiance en leur intelligence que vous leur avez témoignée en partageant avec eux vos expériences et vos conceptions sur la vie comme sur la littérature sans simplifier le propos profond, complexe mais accessible. Ils se sont sentis fiers, ont-ils dit, qu’on leur parle comme à des grands. D’autres ont relevé votre simplicité, conforme à votre discours ; et votre vocation footballistique en a désarçonné quelques-uns qui jugeaient le sport et la littérature inconciliables ! Les clefs de lecture que vous leur avez données ont motivé quelques autres pour une relecture.

Ces moments d’échange marquent une scolarité et une adolescence. Merci pour eux, et pour nous aussi.

Lettre des enseignantes à Philippe Vilain

C’est moi, chère Madame, qui, à travers vous, remercie toutes et tous pour ce sympathique moment de partage en compagnie de vos élèves si attentifs et respectueux, participatifs, intéressés et intéressants. Plusieurs de leurs questions m’ont d’ailleurs donné du fil à retordre comme on dit. Cette rencontre m’a réjoui, vraiment. Et je reste disponible pour d’éventuelles questions de leur part. Avec grand plaisir.

Avec l’expression de mes plus vifs remerciements,

La réponse de Philippe Vilain

Madame,

Nous tenions à vous remercier chaleureusement pour la rencontre de ce matin. Même à distance, et en dépit des aléas du numérique, elle n’a pas été “virtuelle” pour nos élèves qui, en fin de séance, nous ont confié leur joie d’avoir rencontré un auteur, leur plaisir de vous avoir sentie proche d’eux, leur émotion de vous avoir connue au-delà des pages du roman. Ils ont été particulièrement touchés par votre appréhension de la richesse que constitue une double culture, expérience que font quotidiennement nombre d’entre eux, Marocains scolarisés en lycée français, binationaux, ou encore Français vivant au Maroc. Vos mots ont résonné dans leur vie de manière intime et ils ont aussi beaucoup apprécié la confiance qu’ils ont ressentie à travers ces moments partagés.

Pour tout cela, nous vous disons à nouveau merci et espérons avoir le plaisir de nous rencontrer, un jour,… en chair et en os.

La lettre des enseignantes à Line Papin

C’était un honneur et un plaisir pour moi de partager ce moment avec vous, malgré les aléas du numérique, en effet, qui ont compliqué la logistique de la rencontre. Toutefois, j’ai été très heureuse de rencontrer les élèves et j’ai vraiment apprécié leur énergie, leur présence et leurs questions.

J’espère aussi que nous aurons l’occasion de nous rencontrer un jour, dans votre si beau pays.

Amitiés,

La réponse de Line Papin

Nous vous remercions chaleureusement pour cette rencontre. Même à distance, et en dépit des aléas du direct, elle n’a pas été “virtuelle” pour nos élèves qui, pour une grande part, échangeaient pour la première fois avec un auteur.

Nous avons, c’est vrai, quelques regrets de ne pas avoir vu la classe sortir de sa réserve et nous en sommes désolées pour vous. Néanmoins, les quelques mots échangés avant que la sonnerie ne les précipite vers un autre cours sont d’agréables témoignages : les clés de lecture que vous leur avez offertes leur ont permis de mieux apprécier le roman. Surtout, bon nombre de vos propos les ont surpris : ils se sont étonnés du pouvoir des mots et du pouvoir de l’auteur à faire vivre un univers qui n’est pas le sien; ils ont encore été surpris par l’énergie et l’effort nécessaires à l’écriture. Ils ont aimé découvrir les coulisses du livre et ont été sensibles à votre engagement, aux convictions qu’ils ont décelées dans vos propos.

Bien à vous,

La lettre des enseignantes à Stéphanie Hochet

Cher Monsieur,

Nous venons par ce message vous remercier une nouvelle fois.

Nous souhaitions vous partager quelques-unes des réactions de nos élèves. Pour certains d’entre eux c’était la première fois qu’ils échangeaient avec un auteur et ils ont été particulièrement sensibles à votre humilité et votre sincérité. Vous avez nettoyé leur vision un peu caricaturale de l’auteur inaccessible et rétabli le désir et la légèreté dans l’aventure de l’écriture. Merci pour eux, et pour nous. En cela, vous êtes remarquablement fidèle à votre refus de “l’écrivain”. D’autres ont relevé ce que vous leur avez partagé de vos valeurs et de vos représentations, notamment l’entraide, l’attention à l’autre, la double culture et la place que semblent occuper vos amis dans votre vie ! Ce sont des moments qui marquent une scolarité et une adolescence.

La technologie n’a pas toujours été de notre côté et c’est frustrant, sans doute, mais elle a aussi été un joli pied de nez aux restrictions qui nous frappent tous.

En attendant la parution de votre nouveau roman, nous vous souhaitons une excellente continuation.

Bien à vous,

La lettre des enseignantes à Olivier Dorchamps

Merci beaucoup de votre gentil message.

J’ai été ravi de cette rencontre et la technique a finalement suivi, ce qui est le principal. J’espère que les images et le son seront exploitables.

Les questions de vos élèves étaient très pertinentes et j’ai trouvé la classe beaucoup plus dynamique que ce que j’en attendais. Je vous félicite de votre travail et d’avoir suscité la discussion et le débat entre vos élèves et avec moi.

Je suis également très heureux que nous ayons pu vaincre les a priori des élèves au sujet des romanciers. Je ne sais pas si j’ai bien exprimé ce que je voulais dire quant à l’usage du terme “écrivain” qui possède en français un historique qui me déplait. Je conçois l’écriture comme une activité, voire une action, pas comme un métier. En France, il existe une sacralisation de l’écrivain qui me semble néfaste à plusieurs titres. Dans mon esprit, ce dernier ne doit pas se trouver au sommet de la pyramide et regarder le monde de haut, or on l’y place facilement à Paris. Il n’y a qu’à regarder le nombre d’émissions littéraires dans les médias français, ce dont je me réjouis mais ce qui prouve aussi que ce statut d’intellectuel au-dessus des autres est très ancré dans la société. Nous n’avons pas cela en Angleterre. Je préfère me placer en bas de la pyramide et ne jamais faire d’intellectualisme, cela apprend l’humilité. Cette dernière est souvent la meilleure guide lorsqu’on écrit. 

Bien à vous,

La réponse d'Olivier Dorchamps

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